Mc 3, 20-35


« Il a perdu la tête », lance la famille de Jésus à son propos ; « il est possédé par Béelzéboul [...] Il est possédé par un esprit impur », disent les scribes de Jérusalem, sans même chercher à comprendre. Ruse perfide de l'Ennemi qui fait passer pour folle la Sagesse en personne ! Vil artifice du Serpent qui fait accroire démoniaque le Saint de Dieu ! Le piège est d'autant plus redoutable qu'il est posé d'un côté par des proches qui n'ont sans doute pas conscience de faire le jeu du Malin, et de l'autre par des autorités religieuses reconnues qui viennent de la Capitale.

 

Jésus riposte par une réflexion toute de bon sens doublée d'une mise en garde, et par une prise de distance vis-à-vis des liens familiaux naturels jointe à l'établissement d'un nouveau type de famille. Prétendre qu'il expulse les démons par le chef des démons, c'est tomber dans l'absurdité – Satan ne se combattrait pas soi-même – et manquer de voir qu'il est plus fort que l'esprit impur par l'Esprit Saint qui le fait agir. Voilà qui est particulièrement grave, car il se ferme au Don de Dieu qui est rémission des péchés et vie éternelle celui qui persévère à ne pas l'accueillir en Jésus.

 

Dans son encyclique sur l'Esprit Saint, Dominum et vivificantem, le Pape Jean-Paul II écrivait : « Pourquoi le blasphème contre l'Esprit Saint est-il impardonnable ? En quel sens entendre ce blasphème ? [...] le “blasphème” ne consiste pas à proprement parler à offenser en paroles l'Esprit Saint ; mais il consiste à refuser de recevoir le salut que Dieu offre à l'homme par l'Esprit Saint agissant en vertu du sacrifice de la Croix. [...] Si Jésus dit que le péché contre l'Esprit Saint ne peut être remis ni en ce monde ni dans l'autre, c'est parce que cette “non-rémission” est liée, comme à sa cause, à la “non-pénitence”, c'est-à-dire au refus radical de se convertir » (n° 46). Un tel endurcissement revient à se jeter soi-même dans l'enfer (cf. CEC n° 1864).

 

Jésus veut précisément éviter aux hommes cette issue fatale et éternelle en les faisant passer d'un univers de création marqué par le péché et où prévaut la très limitée affection naturelle à un univers de rédemption soulevé par l'Esprit Saint et irrigué par la charité surnaturelle. Il est lui-même ce passage par la conformation de sa volonté humaine à la volonté divine du Père qui n'est pas une volonté tyrannique comme celle du diable, mais précisément la garante de la liberté humaine. Devenir membre de la famille de Dieu, frère et sœur de Jésus, comme aussi mère de Jésus en lui permettant de naître et de grandir en nous et dans les autres par notre collaboration à la grâce, notre prière et l'exemple d'une vie bonne, c'est entrer dans la Rédemption qui est toujours, dit Benoît XVI, « ce processus de porter la volonté humaine dans la communion avec la volonté divine »[1].


[1] Rencontre avec le clergé du diocèse de Rome, jeudi 18 février 2010

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